L’œuvre de Niccolo Machiavelli est un condensé de conseils intelligents sur l’art de gérer un royaume. En transposant certains propos au monder moderne, on en tire un ensemble de recommandations avisées sur l’art de diriger.

Il convient de faire son tri : tout n’est pas à prendre à la lettre, certains propos ont vieilli, c’est parfois machiste… et peu d’entre nous sont princes d’un royaume. Cependant, il y a beaucoup à en apprendre.

L’avez-vous lu récemment ? Qu’en retenez-vous ? Ci-dessous un recueil de citations classées selon la suggestion du consigliere.


Être pragmatique

« Mépriser l’art de la guerre, c’est faire le premier pas vers sa ruine ; le posséder parfaitement, c’est le moyen de s’élever au pouvoir. »

« Il y a si loin de la manière dont on vit à celle dont on devrait vivre, qu’en n’étudiant que cette dernière on apprend plutôt à se ruiner qu’à se conserver. »

« Bien des gens ont imaginé des républiques et des principautés telles qu’on n’en a jamais vues ni connues. Mais à quoi servent ces imaginations ? »

Être bien armé

« Le moyen de se prémunir est d’avoir de bonnes armes et de bons amis ; et l’on aura toujours de bons amis quand on aura de bonnes armes. »

« Entre un homme armé et un homme désarmé la disproportion est immense. Il n’est pas naturel que l’homme armé obéisse volontiers à l’autre ; et un maître sans armes ne peut jamais être en sûreté parmi des serviteurs qui en ont ; ceux-ci sont en proie au dépit, l’autre l’est aux soupçons et des hommes qu’animent de tels sentiments ne peuvent pas bien vivre ensemble. »

Respecter son peuple

« Un prince doit se montrer amateur des talents, et honorer ceux qui se distinguent dans leur profession. »

« Comme tous les citoyens d’un État sont partagés en communautés d’arts ou en tribus, il ne saurait avoir trop d’égards pour ces corporations. »

« Il paraîtra quelquefois dans leurs assemblées, et montrera toujours de l’humanité et de la magnificence, sans jamais compromettre néanmoins la majesté de son rang, majesté qui ne doit l’abandonner dans aucune circonstance. »

Agir en prince

« Faire de grandes entreprises, donner par ses actions de rares exemples, c’est ce qui illustre le plus un prince. »

« Agir, en toute circonstance, de telle façon qu’on soit forcé de le regarder comme supérieur au commun des hommes. »

« Le prince doit se décharger sur d’autres des parties de l’administration qui peuvent être odieuses, et se réserver exclusivement celles des grâces. »

Être admiré

« Le prince doit faire en sorte que dans toutes ses actions on trouve de la grandeur, du courage, de la gravité, de la fermeté. »

« Le prince doit éviter ce qui peut faire mépriser : paraître inconstant, léger, efféminé, pusillanime, irrésolu. »

« Il doit prendre grand soin de ne pas laisser échapper une seule parole qui ne respire les cinq qualités que je viens de nommer ; en sorte qu’à le voir et à l’entendre on le croie tout plein de douceur, de sincérité, d’humanité, d’honneur, et principalement de religion, qui est encore ce dont il importe le plus d’avoir l’apparence . »

« Il n’est pas nécessaire qu’un prince possède toutes les qualités ; mais il l’est qu’il paraisse les avoir. »

Gérer sa réputation

« Tout prince doit désirer d’être réputé clément et non cruel. »

« Il est plus sûr d’être craint que d’être aimé mais on peut fort bien tout à la fois être craint et n’être pas haï. »

« Le prince, ne pouvant, sans fâcheuse conséquence, exercer la libéralité de telle manière qu’elle soit bien connue, doit, s’il a quelque prudence, ne pas trop appréhender le renom d’avare. »

Être aimé

« Un prince qui est aimé de son peuple a peu à craindre les conjurations ; mais s’il en est haï, tout, choses et hommes, est pour lui à redouter. »

« La meilleure forteresse qu’un prince puisse avoir est l’affection de ses peuples ; s’il est haï, toutes les forteresses qu’il pourra avoir ne le sauveront pas. »

« Ce que le prince peut en craindre, lorsqu’il est tranquille au dehors, c’est qu’ils ne conspirent secrètement contre lui ; mais, à cet égard, il est déjà bien garanti quand il a évité d’être haï et méprisé, et qu’il a fait en sorte que le peuple soit content de lui. »

Connaître les hommes

« Tous les hommes ont en vue un même but : la gloire et les richesses. »

« Les hommes, en général, jugent plus par leurs yeux que par leurs mains, tous étant à portée de voir, et peu de toucher. Tout le monde voit ce que vous paraissez. »

« Le vulgaire est toujours séduit par l’apparence et par l’événement : et le vulgaire ne fait-il pas le monde ? Le petit nombre n’est écouté que lorsque le plus grand ne sait quel parti prendre ni sur quoi asseoir son jugement. »

S’attacher l’aide des autres

« Les hommes aiment à changer de maître dans l’espoir d’améliorer leur sort ; cette espérance leur met les armes à la main contre le gouvernement actuel ; mais ensuite l’expérience leur fait voir qu’ils se sont trompés et qu’ils n’ont fait qu’empirer leur situation. »

« Telle est, en effet, la nature des hommes, qu’ils s’attachent autant par les services qu’ils rendent, que par ceux qu’ils reçoivent. »

« Le prince dépense ou de son propre bien et de celui de ses sujets, ou du bien d’autrui : dans le premier cas il doit être économe ; dans le second il ne saurait être trop libéral. »

Choisir ses alliés

« Les forces d’un allié plus fort que soi ne peuvent être bonnes en elles-mêmes mais sont toujours dommageables à celui qui les appelle ; car si elles sont vaincues, il se trouve lui-même défait, et si elles sont victorieuses, il demeure dans leur dépendance »

« Ce qu’on doit craindre des troupes mercenaires, c’est leur lâcheté ; avec des troupes auxiliaires, c’est leur valeur. »

« Les hommes éclairés ont toujours pensé et dit qu’il n’y a rien d’aussi frêle et d’aussi fugitif qu’un crédit qui n’est pas fondé sur notre propre puissance. »

Contrôler ses alliés

« Il doit se faire chef et protecteur des princes voisins les moins puissants de la contrée, travailler à affaiblir ceux d’entre eux qui sont les plus forts, et empêcher que, sous un prétexte quelconque, un étranger aussi puissant que lui ne s’y introduise ; introduction qui sera certainement favorisée ; car cet étranger ne peut manquer d’être appelé par tous ceux que l’ambition ou la crainte rend mécontents. »

« Le prince qui en rend un autre puissant travaille à sa propre ruine ; car cette puissance est produite ou par l’adresse ou par la force : or l’une et l’autre de ces deux causes rendent quiconque les emploie suspect à celui pour qui elles sont employées. »

« Les hommes, en général, n’aiment point les entreprises qui présentent de grandes difficultés ; et il y en a sans doute beaucoup à attaquer un prince dont la ville est dans un état de défense respectable, et qui n’est point haï de ses sujets. »

Former son équipe

« Voyez-vous un ministre songer plus à lui-même qu’à vous, et rechercher son propre intérêt dans toutes ses actions, jugez aussitôt qu’il n’est pas tel qu’il doit être, et qu’il ne peut mériter votre confiance. »

« Il faut aussi que, de son côté, le prince pense à son ministre, s’il veut le conserver toujours fidèle ; il faut qu’il l’environne de considération, qu’il le comble de richesses, qu’il le fasse entrer en partage de tous les honneurs et de toutes les dignités, pour qu’il n’ait pas lieu d’en souhaiter davantage ; que, monté au comble de la faveur, il redoute le moindre changement, et qu’il soit bien convaincu qu’il ne pourrait se soutenir sans l’appui du prince. »

Demander la vérité

« Il faut qu’il ne soit pas trop réservé dans ses questions, qu’il écoute patiemment la vérité, et que lorsque quelqu’un est retenu, par certains égards, de la lui dire, il en témoigne du déplaisir. »

« Les princes n’ont effectivement qu’un bon moyen de se prémunir contre la flatterie, c’est de faire bien comprendre qu’on ne peut leur déplaire en leur disant la vérité. »

« Le prince doit, s’il est prudent, faire choix dans ses États de quelques hommes sages, et leur donner, mais à eux seuls, liberté entière de lui dire la vérité. Il doit, les consulter sur tout, écouter leurs avis, résoudre ensuite par lui-même.

Prendre position

« Tel est effectivement l’ordre des choses, qu’on ne cherche jamais à fuir un inconvénient sans tomber dans un autre. »

« Je pense qu’il vaut mieux être impétueux que circonspect ; car la fortune est femme : pour la tenir soumise, il faut la traiter avec rudesse ; elle cède plutôt aux hommes qui usent de violence qu’à ceux qui agissent froidement : aussi est-elle toujours amie des jeunes gens, qui sont moins réservés, plus emportés, et qui commandent avec plus d’audace. »

Décider

« La prudence ne consiste qu’à examiner, à juger les inconvénients et à prendre comme bon ce qui est le moins mauvais. »

« Il faut que l’on soit convaincu que ses décisions sont irrévocables, et que cette conviction s’établisse de telle manière que personne n’ose penser ni à le tromper ni à le circonvenir. »

« Le parti de la neutralité est celui qu’embrassent le plus souvent les princes irrésolus, qu’effrayent les dangers présents, et c’est celui qui, le plus souvent aussi, les conduit à leur ruine. »

Savoir être méchant

« Un prince bien avisé ne doit point accomplir sa promesse lorsque cet accomplissement lui serait nuisible, et que les raisons qui l’ont déterminé à promettre n’existent plus : tel est le précepte à donner. »

« En faisant un petit nombre d’exemples de rigueur, vous serez plus clément que ceux qui, par trop de pitié, laissent s’élever des désordres d’où s’ensuivent les meurtres et les rapines. »

« Il faut qu’un prince qui veut se maintenir apprenne à ne pas être toujours bon, et en user bien ou mal, selon la nécessité. »

« Tant qu’il le peut, qu’il ne s’écarte pas de la voie du bien, mais qu’au besoin il sache entrer dans celle du mal. »

« Il lui est toujours bon, par exemple, de paraître clément, fidèle, humain, religieux, sincère ; il l’est même d’être tout cela en réalité : mais il faut en même temps qu’il soit assez maître de lui pour pouvoir et savoir au besoin montrer les qualités opposées. »

Être méchant rarement et tout en même temps

« Les cruautés sont bien employées (si toutefois le mot bien peut être jamais appliqué à ce qui est mal), lorsqu’on les commet toutes à la fois, par le besoin de pourvoir à sa sûreté, lorsqu’on n’y persiste pas, et qu’on les fait tourner, autant qu’il est possible, à l’avantage des sujets. Elles sont mal employées, au contraire, lorsque, peu nombreuses dans le principe, elles se multiplient avec le temps au lieu de cesser. »

« Celui qui usurpe un État doit déterminer et exécuter tout d’un coup toutes les cruautés qu’il doit commettre, pour qu’il n’ait pas à y revenir tous les jours, et qu’il puisse, en évitant de les renouveler, rassurer les esprits et les gagner par des bienfaits. »

« Les hommes doivent être ou caressés ou écrasés : ils se vengent des injures légères ; ils ne le peuvent quand elles sont très grandes ; d’où il suit que, quand il s’agit d’offenser un homme, il faut le faire de telle manière qu’on ne puisse redouter sa vengeance. »

Conserver un bien acquis

« Il suffit au prince de ne point outrepasser les bornes posées par ses ancêtres, et de temporiser avec les événements. »

« Il faut seulement que celui qui s’en rend possesseur soit attentif à deux choses, s’il veut les conserver : l’une est, comme je viens de le dire, d’éteindre la race de l’ancien prince ; l’autre, de n’altérer ni les lois ni le mode des impositions : de cette manière, l’ancienne principauté et la nouvelle ne seront, en bien peu de temps, qu’un seul corps. »

« Quand les États acquis sont dans une autre contrée que celui auquel on les réunit, quand ils n’ont ni la même langue, ni les mêmes mœurs, ni les mêmes institutions, alors les difficultés sont excessives, et il faut un grand bonheur et une grande habileté pour les conserver. Un des moyens les meilleurs et les plus efficaces serait que le vainqueur vint y fixer sa demeure personnelle : rien n’en rendrait la possession plus sûre et plus durable. »